La dernière fois que je suis allée à la salle, c’était pour une session d’ Aquagym. Je portais un de mes nouveaux maillots, ceux qui font le ventre plat et sont un rien gainant. Dehors, il ne faisait pas froid et le ciel était bleu, de ce bleu qu'on ne voit que dans les coloriages d'enfants. Et que s'est-il passé, me direz-vous. Je n'en sais strictement rien. Enfin, pour être tout à fait honnête, j'ai peut-être une petite idée.
Il était 9h00, il n'y avait avec moi que des vieilles dames, qu'avec le recul je qualifierais de revêches. Elles me scrutaient, de bas en haut, dans le couloir en attendant que le bassin ouvre. J'étais la seule à avoir pris une douche (je ne savais pas que c’était en option passé un certain âge)(et apparemment, je ne l’avais pas atteint). J'avais froid, la chair de poule, la peau marbrée, la pointe de mes seins au garde à vous et le cheveu humide. Comme vous le voyez, j'étais tout à fait à mon avantage : le dos contre le mur, les mains sous les fesses, la pulpe de mes doigts jouait avec les petits picots du mur. Même lui avait la chair de poule, c’est dire ! À cet instant, j’ai eu très nettement l’impression d’être dans le vestiaire des Chearleaders. Une femme à la coloration blonde parfaite, vêtue d’un maillot de bains à froufrou semblait être leur chef. Elle parlait, elle parlait et moi, je fixais une micro fissure dans le mur derrière elle, en tentant de me souvenir si le matin j’avais correctement vérifié l’épilation de mon maillot. Quand elle m’a regardé, j’ai préféré baisser les yeux (j’ai vu suffisamment de séries américaines pour savoir que c’est la seule chose à faire face à la chef des Chearleaders). J’ai pensé que peut-être, le capitaine de l’équipe de Base-ball se trouvait dans le vestiaire des hommes (Eh! Oh! laissez-moi rêver, ok ? ) et que je pourrais me faufiler près de lui dans la piscine. Ce n’est qu’après que j’ai compris que si capitaine de l’équipe de Base-ball il y avait, il avait pris cher. Est-ce là que se loge la clé de mon abandon de la salle de sport ? Sans doute.
Pourtant, plus jeune, j’avais eu des signes avant-coureurs concernant mon peu d’appétence pour les joies de la natation. Ado, je priais pour avoir mes règles les jours de piscine. Si je ne les avais pas (ce qui se produisait quand même trois fois sur quatre) j’oubliais mes affaires, la fois d’après j’invoquais une otite, ou des verrues plantaires ! (Excuse par excellence). Alors, comment imaginer qu’une fois la cinquantaine installée, j’allais me transformer en reine des couloirs de nage ? Beh, voilà, c’était impossible !
J’aurais peut-être dû choisir un autre sport, me direz-vous (et vous n’auriez pas tout à fait tort) mais, je suis radicale, moi, entière. Avec moi, pas de de mi-mesure : j’ai arrêté le sport.
J'ai arrêté le sport et je l'ai très bien vécu.
Les jours se sont succédé tranquillement, je respirais mieux. Je n’avais plus besoin d’inventer d’excuse pour ne pas y aller (un mensonge en entrainant un autre, je n’étais pas très à l’aise d’insinuer que je ne pouvais pas aller à la piscine pour cause de règles dont je n’avais pas vu la couleur depuis un temps certain). Inutile non plus d’invoquer le nouveau planning de cours qui ne me convenait pas (je n’avais moi-même plus de planning à tenir) ni le mal de dos (de mon mari, parce que le mien allait très bien) (merci), ni les verrues plantaires.
J’ai arrêté le sport et mes cuisses ont elles aussi arrêté de frotter l'une contre l'autre (c’était vraiment très désagréable cette histoire de cuisses qui se touchent). Étrangement, ma taille s'est affinée, étrangement j'ai aussi perdu quelques kilos. Et surtout, surtout, je n’avais plus mauvaise conscience.
Au début, j’ai arrêté tout en continuant à payer l’abonnement. Cela me donnait l'impression qu'un jour, peut-être, j’allais y revenir. Ah, Ah, Ah… Excusez-moi, je reprends. La carte d’accès à la salle avait choisi un endroit judicieux pour couler ses vieux jours : entre ma carte bancaire et ma carte vitale.
Voilà, j'ai arrêté le sport et il ne s'est rien passé. Rien du tout. Le ciel ne s’est pas obscurci et aucune voix n’a surgi de l’au-delà pour me faire la morale. Je n'ai pas dormi moins bien (ni mieux je vous rassure), je n'ai pas perdu mon souffle en grimpant mes trois étages quatre à quatre, ni regardé avec anxiété mes analyses biologiques. Je n’ai pas perdu de densité musculaire (cela dit, peut-être que je n’en avais pas) et mes muscles ne se sont pas transformés en graisse (non, mais, qu’est-ce qu’on nous fait pas croire quand même…) Je n'ai pas pris 25 kilos et je n'ai ni plus ni moins de cellulite qu’avant. Ma silhouette est toujours la même quand je la scrute sous la lumière crue des cabines d'essayage. Elle est toujours celle d'une femme de cinquante ans (passés), plutôt pas trop mal dans ses Converses et c’est déjà pas si mal.
À mon humble avis, cette histoire de sport, c’est un complot !
Mes salles obscures
J’ai arrêté le sport mais je suis retournée au cinéma.
Moi qui suis d’ordinaire plutôt réticente avec les films que tout le monde encense, je suis allée voir The Fabelmans, le dernier Steven Spielberg. Et ? Si je me réfère à mon baromètre personnel, je dirais “bien, mais…” parce que j’ai regardé l’heure trois ou quatre fois. Pour rappel, la dernière fois que j’y suis allée, c’était pour Le Tourbillon de la vie et je ne l’avais regardé qu’une fois. À 5 minutes de la fin.
Dans The Fabelmans, la technique est impeccable et toute en sobriété. Mr Spielberg n’a rien à prouver sur ce plan-là. Quelques scènes resteront dans les annales (la mère qui danse dans les phares de la voiture par exemple) et d’autres m’ont fait sourire parce qu’elles sont des références à sa filmographie. Quand certains ne voient dans ce film que le portrait de la mère (jouée par Michelle Williams), je me suis arrêtée sur celui du père (Paul Dano)(la constance incarnée). Je me suis régalée avec la façon dont il dissèque le travail de réalisateur, sur l’artisanat qui préside à la conception d’un film. Pourtant, il m’a manqué quelque chose. De l’audace, du souffle, un truc de l’ordre de l’émotion et de la transmission.
Deux jours plus tard, je suis allée voir Les Petites victoires de Mélanie Auffret. Autant vous le dire tout de suite, j’aime beaucoup le cinéma français. Voilà. C’est dit. C’est peut-être clivant, mais c’est comme ça. Et donc, fidèle à moi-même, j’ai beaucoup aimé cette comédie tendre, servie par des acteurs très justes (Julia Piaton et Michel Blanc) et de formidables seconds rôles. C’est un film certainement moins ambitieux que le précédent, mais, la fraîcheur et la simplicité, parfois, ça a du bon.
Mes lectures
J’ai arrêté le sport mais je lis.
Je vous en parlerai rarement ici parce que je trouve difficile de critiquer un livre. Je sais la quantité de travail qui se cache derrière, les espoirs et les renoncements de l’auteur. En ce moment par exemple, je suis sur un livre dans lequel j’ai beaucoup de mal à avancer. J’ai fini par tourner les pages sans les lire. Ça ne veut pas dire que ce livre n’est pas bon, ça signifie simplement qu’entre lui et moi, ce n’était pas le moment.
En vrac et pas dans l’ordre …
J’ai arrêté le sport, mais j’ai fait de la créativité ma soupape de sécurité.
Comme je vous en ai déjà précédemment parlé, j’ai décidé cette année de mettre la création au centre de ma vie.
Par la musique avec ma playlist 2023 à laquelle j’ajoute une chanson ou musique par jour avec la seule contrainte qu’elle ne doit être dans aucune autre de mes playlists. Elle fait déjà près de quatre heures alors qu’on n’est que début mars…
Par la scène et la création de mon Seule en scène. WIP.
Par la peinture, le collage ou le dessin avec la réalisation d’un dessin par semaine, toujours basé sur le même principe. 4 carrés sur une page et je laisse aller mon imagination sans contrainte aucune.
Les mots avec cette Newsletter et la relecture de mon dernier roman Des Papillons sous oxygène qui ressort en Poche au mois de Mai prochain.
Et la correction du prochain (vous suivez ?) “Rendez-vous à Héyo”. D’ailleurs pour lui, une Playlist est en cours de création (comme pour chacun de mes romans d’ailleurs) et un soir de solitude j’ai gribouillé sa couverture (ne vous y attachez pas trop, ça ne sera pas celle-là ;)
Rien de bien extraordinaire, mais j’aime la dimension qu’apporte la création tous azimuts dans ma vie. Une forme de légèreté, de pétillement, de paix intérieure. Et j’aime ces rendez-vous réguliers avec elle. Je vous le conseille.
La question existentielle de la semaine
Quel est le premier achat que vous avez fait en Mars ?
Je me suis réabonnée à une revue après que le rédacteur en chef me l’ait demandé trois fois. Je n’avais pas été assez claire quand il me l’avait demandé la première fois. J’avais esquissé un non parce que j’en ai assez de voir toujours les mêmes têtes à l’intérieur. Pour ça, j’avais Instagram. Mais bon, j’ai fini par dire oui. Dans une prochaine vie, j’aimerais naître avec la capacité à dire non, parce que souvent je dis oui pour avoir la paix. À la place, j’avais prévu de m’acheter de l’argile auto durcissante après avoir vu un réel de Margaux Mottin (et en plus de la capacité à dire non dans ma prochaine vie, on pourrait aussi inclure un peu moins d’influençabilité ?)(comment ça, ce mot n’existe pas ?)
Allez, je vous embrasse, à la semaine prochaine.
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Tu as de nombreux talents et surtout l'art de savoir les exploiter. J'aime beaucoup tes dessins.
J’aime beaucoup tes dessins 🤩 as tu une idée de ce que tu en feras à la fin de l’année ??