Chers lectrices, chers lecteurs,
Lors d’un atelier d’écriture, j’ai proposé aux participants de raconter LA soirée de leurs quinze ans, ou du moins, celle qui marquait cet âge là. Je vous confie un bout de mon adolescence.
Bonjour,
Je suis Nathalie LONGEVIAL, romancière, éditrice externe et coach en écriture. Bienvenue dans ma newsletter : “From Baiona with love”. Nous accueillons aujourd’hui parmi les abonnés à la newsletter : BB, Lisa, Karine et Hélène.
Quinze ans, c’était l’âge où les petites filles se transformaient en femme fatale. Je l’avais lu dans Podium, allongée dans ma chambre au fond du garage chez mes grands-parents. Ma mère étant fille unique, leur maison n’en comptait que deux à l’étage. Ils n’avaient pas imaginé avoir quatre petits-enfants ni qu’il faudrait créer un espace de plus pour l’ainée. J’étais installée au garage, ils ne voyaient pas les magazines que j’achetais et ça m’allait très bien.) Chaque mois, sur les deux pages centrales de Podium, on découvrait Valérie, Sandrine, Véronique ou Isabelle à toutes les étapes de leur transformation à coups de rendez-vous chez l’esthéticienne, chez le coiffeur et dans des boutiques de fringues. Que tout soit mis en scène ne m’était jamais venu à l’esprit. Aujourd’hui, on sait que les images sont trafiquées et qu’elles ne montrent qu’une partie de la vérité, mais à l’époque on croyait à ce qu’on voyait. Comme Saint Thomas, on disait. Et moi ce que je voyais, c’étaient des filles vraiment moches au départ et vraiment très jolies à l’arrivée.
Le mien d’été, je l’attendais de pied ferme. J’avais hérité d’une génétique pas trop mauvaise et comme je partais de moins loin, il me semblait qu’arriver à quelque chose d’approchant serait aisé. Je n’avais pas de dents de travers ni d’appareil dentaire, pas de lunettes en cul de bouteille ni d’embonpoint enfantin.
Cet été-là, pour mon anniversaire, mes parents m’avaient offert le concert de Supertramp à Dax, petite ville thermale du sud-ouest. C’était ma soirée et je m’étais préparée avec soin. Après avoir harcelé Mamie, elle avait fini par accepter que je pioche dans son maquillage. J’avais tamponné mon visage avec la houppe pour déposer la poudre de riz, j’avais étalé consciencieusement son rouge à lèvres sur ma bouche et enduit de rimmel chacun de mes cils. Avec la brosse chauffante, j’avais roulé mes cheveux en deux coques de chaque côté de mon visage, façon Sue Ellen[1]. J’avais enfilé mon jean préféré, celui avec les pièces en forme de mains collées sur les fesses, et mon pull rouge décolleté dans le dos. Je n’étais pas loin de ressembler à la Véronique du Podium de juillet 1983. Je ne vis pas le sourcil levé de mon père quand je pénétrai dans la voiture, ni le sourire amusé de ma mère. Sandrine, ma cousine qui était de la partie et déjà installée, m’a dit « t’es super jolie ». Elle avait seize ans, sa transformation avait eu lieu l’année précédente : elle s’y connaissait.
Sur la route, les nuages se sont accumulés dans le ciel. « Il va pleuvoir » a dit mon père. Le déluge a attendu 19 heures, pour s’abattre sur les 20 000 spectateurs. Maman n’a pas eu le temps d’ouvrir son parapluie, de toute façon, elle ne l’avait pas pris. En deux minutes, ma transformation était flinguée. Mes cheveux ruisselaient lamentablement et mon rimmel m’avait transformée en panda.
Le miracle de la beauté se produisait l’été des quinze ans, mais pas le soir du 19 juillet 1983 en ce qui me concernait.
Je vous embrasse,
Nathalie
Les quinze ans des copines
Valérie : 15 ans... Je n'en ai que des souvenirs confus, à base de fêtes de village, terrains de basket, baignades dans la rivière et... foin dans la grange qui grattait quand même drôlement 😁
Nathalie : On a le même âge et la même lecture à l'époque 😍
Célia : J'ai détesté avoir 15 ans, je préfère ne pas m'en souvenir 🙈
Sophie : À 15 ans, je rêvais cinéma et Amérique… ma bible c’était le magazine Première mais bien sur, je n’avais strictement pas le droit de le lire et encore moins de l’acheter ( ce que je faisais quand même en laissant les revues chez une amie).
Alors Podium et Ok, aucun risque que ça me passe entre mains ( officiellement). Mais j’en chopais en douce tout en me sentant à des années lumières du contenu. Je ne voulais pas devenir ces jeunes femmes justement. La simple idée d’une once de féminité ( sur moi) ressemblait à un gros mot.
Et puis j’ai été happée par le rock n roll et là, tout est devenu évident 😍🎸
1983 - 15 ans - mon premier concert de rock ( avec un gros mensonge en alibi) et plus de 40 ans plus tard, rien n’a changé. Même pas mon maquillage 🤣🤣
Andréa : À 15 ans, j’étais moche et j’espérais devenir jolie. Bon, j’ai dû attendre un peu.
Désolée pour le retard, je travaillais avec Tanh sur On ne badine pas avec l’amour … tout un programme.
[1] Sue Ellen Ewing – personnage phare de la série Dallas (ton univers impitoya-a-ble) – 1980 environ.
L’été de mes 15 ans, mon frère a été tué dans un accident de voiture, le jour de l’anniversaire de ma mère. Tout a changé pour nous. Mon adolescence est passée à la trappe. Je n’ai jamais osé sortir en boîte ou créer la moindre angoisse à ma mère.
Je suis sûre que tu était la plus belle des panda ❤️