Chère lectrice, cher lecteur,
Ce matin, je me suis levée avec difficulté. Faut dire qu’hier, nous avons fêté la sortie de mon dernier roman (AKA Un tango pour Doro, que vous trouverez désormais dans toutes les bonnes librairies) et la nuit fut courte. J’avais à peine posé mes pieds sur le plancher, que j’ai pensé à vous. Mais bon sang, j’avais une newsletter à écrire ! Mais qu’est-ce que j’avais fichu toute la semaine ? Rien, faut croire.
Bonjour,
Je suis Nathalie LONGEVIAL, romancière, éditrice externe et coach en écriture. Bienvenue dans ma newsletter : “Vous avez du courrier from Baiona with love”. Nous accueillons aujourd’hui parmi les abonnés à la newsletter : Claude et Suzie.
Alors non, je n’ai pas rien fait. En revanche, je n’ai pas pensé une seule seconde à la newsletter. Alors qu’elle rythme mes semaines depuis plus de deux ans (même quand je suis en vacances et que je n’en écris pas), cette fois-ci, rien. Nada. Keutchi. Wallou (orthographe approximative).
Mais, ne comptant que sur ma capacité à parler à peu près de tout et son contraire, j’ai ouvert mon ordinateur et j’ai eu envie de vous raconter une expérience culinaire dans un restaurant où je ne suis pas sûre d’avoir envie de revenir. Pourtant, j’y étais déjà allée deux fois et j’avais tout aimé : le cadre, l’accueil, les mets, l’ambiance, l’inventivité, l’originalité et la personnalité du chef.
Il a toujours eu une vision de son art très intéressante, s’inspirant de ses voyages et de ses rencontres pour nous inviter dans un voyage gustatif. Pour cette nouvelle carte, il se disait qu’il faisait appel à ses inspirations asiatiques, car il rentrait de Thaïlande. C’était parfait. Vous savez la place que tient l’Asie dans ma vie.
Pourtant, cette fois-ci, la balade était tellement jusqu’au-boutiste, que je suis restée en panne, sur le bord du chemin. Je n’ai pas adhéré à l’histoire qu’il a voulu me raconter. À la fin du repas, alors que nous regagnions la voiture dans la nuit basque pluvieuse, mon mari m’a demandé “alors ? Tu en penses quoi ?” j’ai répondu “je crois que c’est trop perché pour moi, je ne suis pas sure d’avoir apprécié le voyage”, un peu gênée de le reconnaître.
Parce que c’est à un voyage que le chef nous a invité, mais comme il nous arrive parfois d’ouvrir un livre et de ne pas réussir à entrer dedans, j’avais dû oublier mes valises quelque part. J’espérais être accrochée dès le premier service. J’aurais voulu m’abandonner à la rencontre, comme on se glisse sous la couette ou dans un bon bain chaud, me laisser prendre par la main et improviser un pas de deux, mais dès le départ, j’ai ressenti un goût d’inachevé. J’étais incapable de dire ce qui m’avait manqué. L’ambiance, la gentillesse de l’accueil, la beauté du cadre, tout était comme d’habitude.
Le lendemain matin, en croquant dans ma tartine de Marmite, j’ai essayé d’analyser le problème : c’est quoi qui ne t’a pas plu, Nathalie ? Je ne sais pas. C’est pas toi qui voulais y retourner ? Si. Tu as eu largement le temps de te préparer, non ? Si, puisqu’il a fallu attendre trois mois. Alors … ?
Alors, j’ai eu l’impression de retomber en enfance. Tout était mou. Pas de mâche, pas de croquant, à peine une tuile croustillante. Tout était à boire, à manger à la cuillère, à déchirer. Les magnifiques couteaux ne servaient à rien. J’avais presque mal aux mâchoires tant elles auraient voulu croquer. Et puis, l’aventure aussi. Mon mari avait opté pour la confiance, ce qui signifiait qu’on ne connaissait pas les ingrédients. Certains étaient parfaitement reconnaissables, d’autres beaucoup moins. Bon, maintenant, je sais que l’aventure, ce n’est pas pour moi. J’ai cherché la composition de chaque plat (18) cherchant à retrouver les épices et condiments (jamais je ne cherche ce genre de choses quand je sais ce qu’il y a dans l’assiette), passant certainement à côté de l’essentiel : le goût et la magie du moment.
Plus haut, j’expliquais que c’est comme quand on n’arrive pas à entrer dans un bouquin. Dans ces cas-là, on a l’habitude de dire que ce n’est ni la faute de l’écrivain, ni celle du lecteur. On dit : ce n’était pas le bon moment. Voilà !
Un livre, tu le reposes sur l’étagère en attendant le jour où, tu sentiras qu’il s’agit du bon moment, mais comment faire avec un repas ? Je ne pouvais pas me lever et dire : “attendez, je reviendrai une autre fois, un autre jour, une autre saison, parce que là, ce n’est pas le moment. il faut attendre la fin du printemps ou l’automne.” Non, je ne pouvais pas le dire. D’autant plus que le moment avait été particulièrement choisi et attendu (il a fallu 3 mois d’attente pour la réservation). Je n’en veux pas au chef. C’est un créatif hors pair, d’une sensibilité et d’une générosité exacerbées. Il était dans son trip, et moi, je n’ai pas su parler sa langue.
Sans transition,
J’aurais aussi pu aborder un thème qui me prend la tête en ce moment : je me demande ce qu’on fait après.
Après la fin d’un amour, vous allez me dire : la vie continue, on remonte en selle, un de perdu, dix de retrouvés. OK. Des clichés et des banalités qui ont tendance à nous rassurer, mais on les prend (ça ne peut pas faire de mal). Mais, après avoir mené à terme un de ses objectifs ? Un de ceux sur lequel on était focalisé depuis plusieurs années par exemple. On fait quoi ? Après avoir réalisé un rêve, qu’est-ce qu’on fait ? OK, on peut toujours se dire qu’on en a plein d’autres, planifier les prochaines vacances, partir à Tokyo pour les 18 ans du petit dernier, retourner à Brooklyn, revoir la mer depuis la terrasse ou regarder l’horizon depuis le pont d’un bateau sur le Mékong.
Oui, mais.
On fait quoi quand le livre qu’on portait à bout de bras s’est envolé vers sa vie de roman ? Je pourrais sans doute commencer par en écrire un nouveau, mais voilà, c’est là que le bas blesse : je ne retrouve pas la flamme. Vous allez me dire : t’as pas une question à laquelle tu voudrais répondre ? Parce que vous savez que je procède comme ça. J’en ai des tas de questions. J’ai même les plans terminés de cinq romans, mais aucun d’entre eux ne me donne l’impulsion.
Je sais, je vous l’ai déjà dit, mais le dire et le redire me donne l’impression qu’à force, je vais étouffer la tentation de penser que la source est tarie.
Allez sans rancune pour cette newsletter écrite en one shot et un peu en vrac?
Je vous embrasse,
Nathalie
Il faut des moments de doute pour mieux rebondir en espérant que l'inspiration l'envie reviennent vite et en attendant profite du plaisir de voir Doro prendre son envol ...
Après ? Tu peux choisir de te laisser porter et de savourer ce bonheur de voir ton livre en rayon, les partages autour de ton écriture et de l’histoire qu’il raconte. Tu profites. Le reste viendra en son temps, non ? Oui c’est certain. Biz