Bonjour et bienvenue dans ma newsletter : “From Baiona with love”. Je suis Nathalie LONGEVIAL, romancière, éditrice externe et coach en écriture.
À Monplaisir, c’est la première fois que j’ai un potager. Je pense à celui de ma grand-mère qui était immense et a abrité mon imaginaire enfantin quand je mettais des boucles d’oreilles cerises, du vernis à ongles framboise, que je grimpais au figuier ou que je rêvais d’être archéologue en dénichant des trésors d’asperges enfouis dans le sable en buttée.
Maminette avait quelques manies. Elle laissait son couteau dans le collier de serrage du poteau électrique qui se trouvait en plein milieu du potager. Un couteau, dit comme ça, ça n’a l’air de rien, mais c’est d’une importance capitale dans un jardin où il y a continuellement besoin de couper ce qui dépasse. Tout à côté, dans une espèce d’abri fait de trois planches surmontées d’un toit ondulé, elle planquait un rouleau de ficelle, une pelle de petite taille, deux ou trois poches en plastique, un arrosoir, un râteau aux pointes acérées, des pots de yaourts vides et un gaffin, précieux objet avec lequel nous n’avions pas le droit de jouer. J’ai beau chercher la définition dans le dictionnaire, je ne la trouve pas. C’est sans doute un mot qu’elle inventé : Maminette emmêlait le français et le patois avec désinvolture, acoquinait les anciens et les nouveaux francs et se moquait royalement des euros. Voici à quoi ressemble un gaffin : c’est une branche à longue tige coupée à la naissance d’une autre, de telle sorte que l’ensemble forme un crochet pour attraper les branches trop hautes des cerisiers et chargées de fruits.
Le premier printemps où nous sommes arrivés à Monplaisir, nous avons décidé d’installer notre potager à l’emplacement de la mare que nous n’arrivions pas à assécher, près du mur partiellement détruit et couvert de vigne vierge. Le choix n’était pas des plus judicieux : pour y accéder depuis la maison, il fallait passer par notre chambre, ce qu’ont fait nos enfants, chaussés de bottes en caoutchouc crottées, sans aucune pensée pour le sol.
J’ai fait des croquis et imaginé à quoi pourrait ressembler le lieu. J’ai hésité entre le potager de la mère de famille et celui des copains, ou peut-être celui de la fainéante. Je voulais mélanger les fleurs et les légumes, cultiver avec la lune, et m’accommoder des escargots. J’ai acheté des dizaines d’ouvrages sur le sujet, des almanachs, des gants colorés et une brouette aux roues perpétuellement dégonflées.
On a commencé par récupérer les carreaux de terre cuite entreposés dans l’atelier pour délimiter les allées. On a planté des barrières en bois, pas plus hautes que la hauteur de mon mollet. Au centre, nous avons placé un guéridon et deux chaises pour pouvoir siroter un verre de vin blanc avec les tomates cerises à portée de mains, et un vieil arrosoir en zinc pour nous rappeler à l’ordre. Le premier été, mon père m’a offert un panier à roulettes dans lequel j’ai pu mettre tout mon attirail et des plaquettes peintes en noir sur lesquelles j’ai inscrit le nom de mes plantations.
J’ai commencé à raconter une histoire.
C’est l’histoire de gens qui viennent prendre l’apéritif dans leur potager sur la petite table pour regarder le soleil se coucher sur le pigeonnier du voisin. Pour marquer les quatre coins de l’espace, ils ont planté des pieds de lavande, de romarin et des sauges échevelées. À l’entrée sud-est, ils ont installé leur carré de simples : de la menthe têtue qui ne veut pousser qu’en direction du mur et qui meurt de ne pas trouver d’espace suffisant, du persil et de la coriandre qui se mélangent avec fantaisie, du basilic fatigué et la verveine citron qui leur offre des infusions à profusion. Assis à leur table, ils font des paris sur la grosseur des radis croquants cachés sous la terre et la hauteur de ton du rouge des fraises encore blanches. Ils regardent les courgettes et les aubergines prendre de l’ampleur, les piments d’Espelette rougir et la petite vie des insectes capturés par les capucines et les rosiers. L’automne venu, ils cassent des noisettes allongées distribuées par les arbres qui bordent l’arrivée à la maison. Le matin, à la fraîche, la femme vient, nus-pieds, ramasser une salade pommée, elle s’empare du petit couteau fiché entre deux pierres du mur. Il est un peu rouillé, mais elle l’aime bien ce couteau qui ressemble à celui de sa grand-mère. Elle s’accroupit, le place contre la terre et coupe le pied du légume. Ça fait un bruit curieux quand on coupe le pied d’une salade, un son d’eau. Le liquide amer et blanc coule sur les doigts. Alors, elle regarde sa salade, lui cherchant des défauts. Une toute petite limace noire cachée près du cœur, quelques feuilles trouées à la manière d’un composteur, mais dans son regard il y a une immense tendresse : cette salade est la sienne. Elle n’a pas le goût de celles achetées dans un supermarché, ni même celui de celle achetée chez le primeur. Non, elle a le goût de la persévérance, des arrosages réguliers, quand le soir venu, elle aurait préféré se vautrer sur son canapé. La salade entre les mains, la femme se tient bien droite au milieu du potager. Elle regarde le grand champ qui s’étend au-delà de ses quelques vingt mètres carrés de culture. Vingt mètres carrés, finalement, c’est bien suffisant. L’été, les tomates crèvent sur pieds tant il y en a, et les salades montent en graines, quant aux courgettes, elle pourrait faire des concours de la plus grosse. Sûr qu’elle gagnerait.
Parfois, ils diront que c’est compliqué d’arracher les mauvaises herbes, que ça fait mal au dos et que ça tache les doigts. Que c’est fatigant d’aller chercher l’eau, mais à l’instant, elle n’y pense pas. Depuis le potager, elle fixe un point au loin et guette la lisière du bois, parce que là-bas, tout en bas du champ, sous les branches des chênes poussent les girolles. Un tapis gigantesque pour les jours où il y en a marre des courgettes et des tomates. Peut-être un jour, y trouvera-t-elle un gaffin ?
Le potager des copines :
Marie Anne : Des choux frisés ou pas, rouge ou blanc, des choux-fleurs, des choux raves, du chou kale 🥬
Claude : Des fèves pour faire de la soupe avec les pousses du haut et du ragoût de fèves jeunes au cumin, des tomates et des salades en combattant contre les limaces. Et puis des capucines,, oui oui ça se mange
Nathalie : Des tomates...toutes sortes de tomates..cœur de bœuf, cerises, marmandaises....et des herbes aromatiques..thym. basilique, coriandre, persil, romarin..
Céline : Moi, j'aime les courges, et de toutes les couleurs 😊 Surtout, cela pousse tout seul, et ça s'hybride réservant de belles surprises !
Amal : Des mini con-combres 😂
Langarika : Ce serait un petit jardin avec un large horizon où pousseraient tout emmêlés des légumes et des fleurs. Il y aurait un cerisier, des plants de tomates, de la roquette et des petits oignons.A l'automne j'y cueillerais des butternuts et des potimarons.Il y aurait aussi des framboisiers ,et des pois gourmands .Un petit jardin pour y voir loin.
Cécilia : Des tomates qui ont le goût de la tomate, des courgettes, des haricots verts, des plantes aromatiques 🪴
Nathalie : J'ai un potager, en ce moment j'ai des fèves pour le printemps, et sinon je mets des tomates, butternuts, potimarron, courges de nice, courgettes, poivrons, aubergines, cardes, haricots, salade, basilic, physalis etc... Petit mais on y arrive et ainsi on mange bio et bon.
Géraldine : J'ai un petit potager, principalement cultivé pour les légumes d'été : tomates, concombres, courgettes et nouveauté de l'été dernier : cornichons 😁, une réussite ! Et un pied d'oseille que je garde précieusement car il vient de chez ma grand mère 😍
Bonne semaine, je vous embrasse,
Nathalie
Les tomates 🍅 tiennent le haut de la liste, pourtant pas si facile que ça de les cultiver. J'ai appris cette semaine que seuls les bourdons pouvaient féconder les aubergines 🍆, bonnes fêtes à tous.
J’adore !
En lisant ton texte, je me balader dans ce potager, et ça m’a fait remonter un souvenir.
Les balade le soir, un peu avant qu’il fasse complètement nuit, principalement en été, où nous nous baladions pied nu, à faire le tour du jardin, à admirer chaque arbres, nuages, animal venus nous dire bonjour.